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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/136

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

qui se partagent sur ses tempes, et laisse flotter les autres au souffle de l’air. Puis, en avant des roues, elle a placé d’autres Amours aux ailes et à la ceinture dorées, conduisant le char et agitant des torches élevées. » La louange des époux se mêlait à ces gracieuses images.

« C’étaient deux roses du printemps nées dans la même prairie et s’épanouissant à la fois. L’affinité de leurs âmes était merveilleuse ; tous deux purs, de mœurs délicates, et divers dans leurs travaux, selon la loi de la nature : elle, par son fuseau, s’élevant à l’art de Minerve, et lui, dans ses labeurs, recueillant les dons du dieu Mercure ; elle ayant sa lyre, et lui passionné pour les livres ; elle aimée d’Aphrodite, et lui d’Apollon ; lui le premier des jeunes gens ; elle privilégiée parmi les filles. » Enfin Sapho, dans des paroles perdues dont s’est inspiré Catulle, comparait la jeune fille à ce fruit défendu, et « conservé dans sa fleur pour celui qui doit le cueillir. »

Tout cela, si nous l’avions encore dans sa grâce originale, serait pour nous un modèle de goût et d’élégance, trésor de poésie, chef-d’œuvre de style embelli par la passion. Mais, chose curieuse, à l’époque où de maladroits rhéteurs brisaient ces délicats chefs d’œuvre pour en émailler leurs discours, ce qu’ils cherchaient encore c’était le charme mythologique à opposer au triomphe du christianisme. On eût dit qu’ils se défendaient dans leurs écoles, comme plus tard Béli-