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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/189

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

tre, s’il n’y avait eu, dans l’instinct même de grandeur qui les rapprochait, quelques différences marquées de vocation comme de patrie.

En effet, de même qu’à Marathon et à Salamine ce fut Athènes qui repoussa surtout le poids de l’invasion barbare, ainsi c’était dans Athènes seule qu’avait commencé et que s’était rapidement agrandie la merveille de l’art antique. Cet éclat extraordinaire que jetait dès lors la tragédie, et qui faisait d’un succès dramatique un événement des fastes nationaux, cette illustration du génie poétique sous la forme la plus vivante, était renfermée dans la cité de Minerve. C’était au pied de l’acropole d’Athènes qu’un art nouveau, et si grand déjà, faisait accourir les autres citoyens de la Grèce comme spectateurs et non comme rivaux. C’était là qu’apparaissait, dans sa plus haute puissance, cette invention du théâtre parée de tous les arts qui faisaient cortége à la poésie, cette tragédie, créée depuis un demi-siècle, relief des festins d’Homère, disait Eschyle, y mêlant le spectacle, la musique et le chant, image sublime des temps fabuleux de la Grèce, mais encore assortie à son âge politique et guerrier ; école d’héroïsme comme de génie, où les vainqueurs, en se célébrant eux-mêmes, s’engageaient de nouveau à vaincre pour leur pays. C’est là que, pour juges de ce prix de l’art dramatique décerné, aux applaudissements d’un peuple idolâtre, la tragédie naissante avait eu les dix généraux de l’armée de Mara-