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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/202

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

Théocrite, avait beaucoup travaillé sur Pindare et chargé de notes un texte grec du grand lyrique, ne voit en lui qu’un chantre de combats à coups de poings, le premier violon du roi de Sicile. Ailleurs même il l’appelle « cet inintelligible et boursouflé Thébain, auquel M. de Chabanon veut bien prêter, en le traduisant, de l’ordre et de la clarté, » au lieu de faire de son chef quelque tragédie nouvelle, ou quelque opéra.

Cette opinion devait être celle de la critique française au dix-huitième siècle, époque où les lettres grecques, cette grande source du génie, de la philosophie sublime et de la belle poésie, n’étaient étudiées, pour le fond des choses et pour la pensée, que de Montesquieu et de Rousseau, qui s’en trouvèrent bien. On sait comment d’ailleurs elles étaient, pour la langue et l’art, négligées de presque tous, hormis quelques rares érudits, jusqu’à la renaissance poétique tentée par André Chénier. Mais nous sommes ici bien loin de ces injustes dédains d’un siècle trop raffiné ; nous essayons de comprendre, à la lumière du passé, Pindare comme Eschyle, et de les expliquer l’un par l’autre : car ils se touchent et se ressemblent.

Vu à cette lumière, ce qui nous reste de Pindare ne doit pas encourir le reproche de monotonie tant répété par la critique vulgaire. Ses odes ne paraîtront plus, comme on les appelait, de pompeuses digressions sur des sujets stériles. Le sujet commun à toutes, c’est la gloire de la Grèce et les épreuves viriles qui préparent cette gloire.