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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/249

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

de mélodieux accords. Mais toi qui fais si bien résonner sur la lyre les doux sons du printemps, commence pour nous des anapestes :

Ô vous, hommes, plongés dans les ténèbres de la vie, semblables à une génération de feuilles, êtres imbéciles, fange animée, foule insaisissable et pareille à une ombre, êtres éphémères sans plumes, misérables mortels, hommes qui ressemblez à des rêves, songez à nous, race immortelle, à nous, vivant toujours dans notre vie aérienne, exempte de vieillesse, contemplateurs des choses éternelles : et, de la sorte, ayant une fois appris de nous la vérité sur le monde céleste, connaissant à fond par moi l’essence des oiseaux, la filiation des dieux et des fleuves, de l’Érèbe et du Chaos, vous direz de ma part à Prodicus de désespérer du reste.

Il existait le chaos et la nuit, et, au commencement, le noir Érèbe et le Tartare ; mais ni la terre, ni l’air, ni le ciel, n’étaient encore. Dans le cercle infini de l’Érèbe, avant tout, la Nuit aux ailes noires produisit un œuf non couvé, d’où, par la révolution du temps, jaillit l’Amour, père des Désirs, battant son dos de ses ailes dorées, et semblable lui-même aux tourbillons de la tempête. Accouplé au Chaos volatil et ténébreux, dans la profondeur du Tartare, il enfanta notre espèce, et, pour la première fois, la produisit au jour.

Il n’y avait pas, en effet, une race d’immortels,

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