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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/305

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

croître à l’avenir le génie moderne. Là sans doute se réfléchit et se prolonge un rayon de la Grèce, mais avec ces nuances diverses qui laissent à l’esprit romain sa part de nouveauté native et sa teinte originale. Pour en bien juger et les saisir à la source même, nous aurons à remonter un peu dans la chronologie littéraire.

Nous pourrions, en suivant l’histoire de la poésie dans la Grèce, et avec elle la tradition des faits helléniques, attendre les Romains à Corinthe ; nous les y verrions, libérateurs apparents de la Grèce, c’est-à-dire conquérants sous une autre forme. Mais la Grèce, même à ce jour de folle joie, dans l’amphithéâtre des jeux Isthmiques[1], n’était plus qu’une affranchie et ne retrouvait pas l’inspiration en sortant de la servitude. Cherchons plutôt cette inspiration sur le sol à demi sauvage de ses affranchisseurs, dans ce rude Latium, témoin de leurs premiers combats. Empruntons aux monuments grossiers de leur ancien culte quelques vestiges de flamme poétique.

Le hasard même, qui a tant mutilé la statue du passé, sera d’accord ici avec les conjectures de la raison. La plus antique parcelle conservée d’un hymne romain se rapportera toute à la simplicité rustique, au travail des champs de ce peuple guerrier. Ce seront quelques mots de la prière des frères Arvales, de cette courte antienne qu’à certains jours, au sortir

  1. Plut. Vit. Flam., p. 447.