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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/431

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

Couronne-moi des fleurs de la douce persuasion. Que mon âme, délivrée des orages, goûte la paix et ne gémisse pas dans les soins terrestres ! mais que, puisant aux fleuves aériens de tes ondes célestes, ô Dieu, je la rafraîchisse et la pénètre des dons de la sagesse ! »

Une teinte profane, sans doute, s’attache encore à ces derniers vœux du poëte. Au lieu de souhaiter chrétiennement la souffrance et la résignation, il demande encore à Dieu la gloire et les belles fleurs de la douce persuasion, comme aurait fait Pindare. Son imagination est moins convertie que son cœur. Il tient aux anciennes félicités du sage, non pas seulement à cette paisible constance que peut remplacer la paix évangélique, mais aux récompenses terrestres du talent et de la vertu ; il désire le calme, l’aisance heureuse, et, comme poëte, sans doute la gloire.

Mais, vous le voyez, il comprend, il exprime le dogme aussi bien que le ferait Athanase lui-même. Et, quant à cette puissance de création transmise directement au Fils, pour mieux marquer, sans doute, l’inséparable identité des Personnes divines, l’orthodoxie chrétienne est encore là d’accord avec l’imagination du poëte. Ce ne sera pas, sans doute, au point de vue théologique, une réprobation pour cette image sublime, que le génie de Milton l’ait recueillie, et gravée à jamais dans le poëme immortel où il montre le Fils de Dieu, à la voix du Père, formant l’univers, dont il