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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/446

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

obsèques des puissants et des riches. La poésie la plus élégante, dans le siècle poli qui succédait aux proscriptions romaines, ne s’était pas refusé ce langage du deuil dans l’élégie et dans l’ode, et les noms d’Ovide et d’Horace nous le disent assez. Il n’est besoin de rappeler ce que même l’épicurien Horace a trouvé de touchant sur la brièveté de la vie et les regrets de l’amitié qui survit. Sa poésie moqueuse devient douce et charmante. La mélancolie qu’elle inspire, sans être la vertu, fortifie du moins les âmes par la résignation.

Mais combien cette philosophie manque à la fois de grandeur et de tendresse ! combien elle ôte à l’imagination et au cœur ! S’agit-il du noble orgueil de l’esprit, dans sa croyance à l’immortalité, quel mécompte devaient lui donner ces vers d’Horace sur un sage illustre :

« Ô toi qui mesurais la mer, et la terre, et le sable infini, Archytas, te voilà réduit à un peu de poussière, sur le rivage de Matine ! il ne te sert de rien d’avoir abordé les régions de l’éther, et promené dans le cercle des cieux ton esprit qui devait mourir ! »

S’agit-il des meilleurs sentiments de l’homme, de la fidélité des souvenirs, le poëte n’attend pour l’ami qu’il a perdu qu’un perpétuel sommeil[1]. Ailleurs il ne se promet à lui-même qu’une première larme sur

  1. ......Ergo Quinctilium
    Perpetuus sopor urget.