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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/49

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

Thèbes et maîtres de la ville, ils s’abstinrent de la seule maison qui portait pour inscription : « Ne brûlez pas le toit du poëte Pindare. » Générosité facile qu’Alexandre imita plus tard et dont il fut trop vanté !

Dans cette petite maison, dont Pausanias marque la place sur le bord de la fontaine Dircé, et d’où le poëte entendait, la nuit, les prières chantées tout auprès dans le temple de Cybèle, Pindare passa des jours paisibles et purs, comme l’affirme plus d’un témoignage exprimé dans ses vers. C’est de là qu’il bravait la calomnie des envieux, comme l’oiseau de Jupiter les cris des oiseaux babillards[1] ; c’est là qu’il s’approchait sans trouble des noirs confins de la vieillesse. Il avait, de son union avec Mégaclée, un fils du nom de Daïphante, inconnu dans l’histoire, et deux filles, Protomaque et Eumétis.

Parvenu à un âge avancé, il fréquentait encore, dans les principales villes de la Grèce, ces solennités populaires tant célébrées par sa voix. On rapporte qu’il mourut tout à coup, au milieu même des jeux publics d’Argos. Cette mort, suivant un autre récit, n’était pas pourtant imprévue. Quelques jours auparavant, Proserpine était apparue au poëte endormi, et, se plaignant à lui d’être la seule divinité qu’il n’eût pas encore célébrée, elle avait ajouté qu’il le ferait du moins lorsqu’il serait venu près d’elle. La prédiction

  1. Pind., ed. Boiss., Nem. 3. p. 193.