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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/569

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

ma toute sa vie, comme il sanctifia sa mort. Consumé par les fatigues de son zèle et par le regret de ses stériles efforts, Héber succomba de bonne heure à l’épreuve dévorante du ciel de l’Inde. Il mourut à trente-sept ans. Sa jeune femme, initiée aux mêmes études, rapporta en Angleterre ses ouvrages, qu’elle a publiés en y joignant sa vie.

Son nom est demeuré célèbre et surtout aimé dans toutes les communions protestantes. L’Amérique du Nord réimprime ses vers ; et dans un des États-Unis de formation récente, près des chutes du Niagara, deux églises ont été bâties, avec des inscriptions consacrées à sa mémoire. Voilà les honneurs rendus à ce noble et gracieux génie, qui, dans la foi romaine, aurait mérité d’être un saint, et qui a laissé, chez les dominateurs de l’Inde, la renommée d’un sage et d’un poëte. Puisse, sous un autre ciel et parmi d’autres descendants de ses compatriotes, l’invocation religieuse de son nom adoucir un peu la rudesse de l’extrême démocratie ! Puisse le pieux souvenir et la vertu chrétienne d’un tel homme, d’accord avec d’autres voix évangéliques, inspirer un peu de honte à ces barbares civilisés, qui fondent la liberté de quelques districts du Septentrion américain sur l’esclavage, et naguère maintenaient l’inviolabilité de l’esclavage par l’oppression et l’assassinat des contradicteurs !

Puisse enfin le nom et l’exemple de Réginald Héber revenir aujourd’hui sans cesse à la mémoire de ses

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