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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/600

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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

les lois, demeure pour les peuples et les princes un formidable enseignement. »

Un discours de M. de Lamartine, à la même date, avait quelque chose de cette raison profonde cachée sous la poésie. Mais doña Gomez ne l’avait pas entendu, et, sous la forme lyrique, elle se rencontrait de génie avec une des inspirations de la tribune française. Cherchons ailleurs toutefois des perspectives plus hautes encore.

Il n’est besoin de redire où la veuve de Pedro Sabaler a dû placer les siennes, mais dans la prière même elle trouvait la poésie ; de là, son Hymne à la Croix. La sainte majesté du sujet, la gravité de l’affliction chrétienne, élèvent ici le talent du poëte et lui donnent, dans l’expression et dans la mélodie, un calme de douleur et de foi dont la simplicité presque intraduisible semble une voix mystique entendue dans un songe, mais qu’on ne peut retrouver. À quinze siècles de distance, la poésie de l’évêque de Ptolémaïs reparaît sur les lèvres d’une Espagnole d’Amérique. Quelle propagande pour l’Évangile ! Quelle rapidité dans l’infini du temps, et comme ce chant nouveau s’en est inspiré !

« Je chante la croix. Que le monde se réveille ! Peuples et rois, écoutez ! Que l’univers se taise à nos accents ! Et toi, suprême auteur de l’harmonie, qui donnes des sons à la mer, au vent, à l’oiseau, prête une force virile à mes accents, et accorde-moi