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Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/609

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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

Candie, cette terre admirable par le commerce et les arts, cette compensation dans un partage inévitable, ne peut rester barbare ; et ces changements qui s’apprêtent, ces révolutions suspendues sur l’orient de l’Europe, conduiront à la plus grande œuvre que puisse se proposer l’esprit moderne, à la renaissance de ces belles contrées, de ces riches cultures, qui, du golfe de Clazomène au mont Olympe d’Asie, et des sept villes de l’Apôtre aux murs d’Antioche et de Nicomédie, formaient, sous le nom de province d’Asie, un si fertile empire. Les ruines désertes et les pierres brisées des inscriptions nous apprennent ce que cette terre admirable pourrait redevenir, non plus seulement sous la domination active d’une race d’Europe, mais sous la puissance électrique des arts nouveaux et de la science moderne.

C’était le rêve de Fourier, l’illustre secrétaire de l’Académie des sciences. « La Syrie, disait-il, l’Ionie, la Cilicie, la Troade ! La tête tourne de songer ce que deviendrait ce pays, travaillé par nos machines, et sous les eaux et les feux dont nous disposons. Il y aurait là pour nous, à volonté, avec les produits de nos plus belles contrées méridionales, toutes les richesses des tropiques. L’Asie Mineure est une autre Amérique, à la porte de l’Europe. » Et ce grand esprit, qui n’avait pas dédaigné de tracer le modèle d’un travail de statistique usuel pour Paris, mais qui, dans sa profonde science mathématique, gardait et laissait voir un instinct d’élévation morale,