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Page:Villeneuve - Le Temps et la patience, tome 2.djvu/159

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ET LA PATIENCE.

j’ai résolu d’aller volontairement me jetter dans son bûcher, pour avoir l’avantage de la servir dans l’autre monde ; car je crois que le cruel Sacrificateur poussera l’inhumanité jusqu’à refuser de lui donner aucun Esclave : on doit tout attendre d’un homme aussi barbare. C’est ce qui fait, que, pour empêcher qu’il ne s’oppose à mon dessein, je n’irai pas m’offrir en cérémonie, comme cela se devroit ; mais après m’être purifiée secrétement, feignant de m’approcher du bucher par simple curiosité, je tromperai sa malice, en m’y précipitant, sans qu’il puisse m’en empêcher.

Cette femme, ayant ainsi fini le récit des troubles d’Angole, auroit reçu des louanges sur sa fidélité, & sur la généreuse résolution qui la portoit à vouloir être de la Cour de sa Reine après sa mort ; mais la douleur de Merille, & l’occupation qu’elle donnoit à ses compagnons, les empêcha de célébrer les louanges qu’elle méritoit, & elle se retira lorsqu’elle eut tout dit, sans que ses auditeurs pensassent seulement qu’ils auroient dû la remercier de la peine qu’elle avoit prise à leur apprendre ce qui se passoit.

Ce que cette femme venoit de leur dire, jetta Merille dans une affliction qui