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Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres I-VI.djvu/69

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abeilles se répandre au printemps sur l’émail des prairies, et s’animer au travail sous un ciel sans nuages. L’une conduit le jeune essaim, déjà fier de ses ailes, l’autre épaissit un miel liquide, et remplit ses cellules d’un doux nectar. Celles-ci reçoivent les trésors qu’apportent leurs compagnes ; celles-là, réunies en bataillon, repoussent de la ruche le frelon parasite. Tout s’empresse à l’ouvrage, et le thym odorant s’exhale des rayons embaumés. « Ô fortuné le peuple, dont s’élèvent ainsi les murailles ! » dit le fils de Vénus, et le héros contemple en soupirant le faîte altier des édifices. En même temps, ceint de la nue merveilleuse, il se mêle, ô prodige ! parmi les flots des Tyriens ; et, présent à leurs yeux, il n’en est point aperçu.

Au centre de la ville était un bois religieux, couronné d’un riant ombrage, et dont les Phéniciens avaient cherché l’abri, quand la tempête les eut jetés sur ces bords. En y fouillant la terre, ils découvrirent dans ses entrailles la tête d’un coursier belliqueux, noble gage des faveurs de la puissante Junon, signe heureux des exploits et de l’abondance réservés un jour aux enfans d’Agénor. Dans cette enceinte vénérée, Didon bâtissait pour la reine des dieux un temple magnifique, orné de riches offrandes et des images de la déesse. Cent degrés conduisaient à son vaste portique : le bronze en couvrait les colonnes, le bronze en décorait les voûtes, et l’airain des gonds mugissait sous des portes d’airain. Là, vient enfin s’offrir aux regards d’Énée un spectacle qui le rassure ; là, son âme ose enfin s’ouvrir à l’espoir du salut, et se flatter d’un moins triste avenir. Tandis qu’en attendant la