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Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/163

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trompeur, nous enfouir, pour vaincre, dans ses flancs ténébreux. C’est à la clarté du ciel, c’est à la face des dieux mêmes, que je veux, moi, de leur repaire faire un vaste bûcher. Turnus leur apprendra qu’ils n’ont point affaire à des Grecs, à cette jeunesse d’Argos qu’Hector arrêta dix années. Mais déjà le soleil penche vers son déclin. Vous donc, soldats ! contens des travaux du jour, donnez la nuit au repos ; et demain, prêts aux combats, espérez la victoire. »

Cependant Messape est chargé de placer aux portes une garde assidue, et d’allumer autour des lignes des feux qui les éclairent. Quatorze guerriers choisis doivent observer les forts ; sous chacun d’eux marchent cent braves au panache de pourpre, au casque brillant d’or. Déjà commence la ronde vigilante ; tour à tour on se croise, on se relève tour à tour ; puis, sur la molle verdure, on noie dans le vin les soucis, on boit à pleines coupes l’oubli des fatigues passées. La flamme luit dans les ténèbres ; et les jeux, trompant le sommeil, charment les veilles de la nuit.

Du haut de leurs murailles, les Troyens ont vu ces apprêts, et leur cœur n’est pas sans effroi. Les uns, de leurs rangs armés, couronnent les créneaux ; les autres, à l’envi, courent explorer les postes. Ceux-ci joignent par des ponts et les boulevards et les tours ; ceux-là font de vastes amas et de lances et d’épées. L’âme de ces travaux, c’est Mnesthée, c’est l’ardent Séreste, eux qu’un héros absent oppose à la tempête, eux qui sauront, dans les alarmes, diriger ses phalanges et commander pour lui. Déployées le long des