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Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/185

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où t’ai-je perdu ? où te chercher ? » Alors, s’enfonçant de nouveau sous ces épais feuillages, il en parcourt de nouveau le labyrinthe obscur ; il interroge avec inquiétude la trace de son premier passage, et seul erre au hasard dans les taillis silencieux. Tout à coup il entend hennir des coursiers ; il entend leur marche lointaine : un bruit confus annonce l’ennemi qui s’approche. Nisus écoute : bientôt un cri subit a frappé ses oreilles ; c’est le cri d’Euryale : il voit l’infortuné que pressent de toutes parts les soldats de Volscens ; il le voit qui, trahi par les lieux et la nuit, et par le trouble d’une attaque imprévue, se débat vainement au milieu des bras qui l’enchaînent.

Que résoudre ? quelle force, quelles armes emploîra son audace pour délivrer son jeune ami ? S’élancera-t-il, plein d’un beau désespoir, à travers ces rangs conjurés ? cherchera-t-il, au milieu du carnage, un glorieux trépas ? Soudain son bras nerveux balance un javelot ; et, levant les yeux vers la reine des nuits, il l’implore en ces termes : « C’est toi, divinité puissante, toi, dont j’invoque le secours en ce péril extrême. Honneur des astres, ô fille de Latone, ô déesse des bois, écoute mes vœux supplians ! Si jamais Hyrtacus, mon père, a chargé tes autels d’offrandes en faveur de son fils ; si tant de fois j’y portai moi-même le tribut sanglant du chasseur ; si ma main suspendit souvent à tes voûtes la dépouille des forêts, en décora souvent tes portiques sacrés, permets que j’envoie la terreur à cette foule homicide, et conduis mes traits dans les airs. »