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Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/343

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de la noblesse latine, se rendent auprès du vainqueur, et lui présentent le rameau de la paix ; qu’ils lui portent mes dons, l’ivoire et l’or, présens des rois, et la chaise curule et l’antique trabée, symboles du souverain pouvoir. J’ai dit ; examinez ; et que votre sagesse trouve un remède aux maux de la patrie. »

Drancès alors se lève ; Drancès, cet ennemi jaloux qu’afflige la gloire de Turnus, et que tourmente en secret l’aiguillon de l’envie ; Drancès, opulent citoyen et disert orateur, mais guerrier sans courage ; politique habile dans les conseils, et factieux redoutable dans les troubles civils ; fier du noble sang d’où sa mère est sortie, mais né d’un père sans renom : il se lève ; et sa haine, qui s’exhale en reproches, exaspère en ces termes le courroux des Latins :

« Votre prudence, ô roi plein de bonté, ouvre un avis trop clair : que serviraient de longs débats ? Chacun de nous connaît assez les besoins de l’empire ; mais on craint de parler. Qu’il n’enchaîne plus nos langues, qu’il rabatte enfin de son orgueil, celui (j’ose le dire, malgré le fer et la mort dont il menace ma franchise), celui dont l’ambition funeste et le génie sinistre ont entraîné dans la tombe tant de guerriers illustres, ont plongé nos villes dans le deuil ; celui dont la folle audace s’attaqua sans honneur aux murailles troyennes, et qui même en fuyant bravait encore les cieux. À ces riches présens que vous destinez aux Troyens, ajoutez, prince auguste, ajoutez un présent plus beau : que les fureurs d’un insensé n’intimident point la sagesse