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Page:Vivien - Les Kitharèdes, 1904.djvu/71

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ÉRANNA

nommée la Fleur des Grâces. Éranna apparaît à travers les lignes de la grande Amoureuse :

Jamais je ne vis d’orgueil comparable au tien, Éranna.

Cette âme lointaine s’y révèle à demi. Éranna possédait la fierté chaste des vierges, et la hautaine réserve des Poètes. Et Psappha l’admira pour avoir su garder jalousement le respect farouche de soi-même. Elle loue, sans doute, sa radieuse disciple en ces termes :

Je crois qu’une vierge aussi sage que toi ne verra dans aucun temps la lumière du Soleil.

Éranna pouvait dire, comme Psappha elle-même : Je crois avoir reçu une bonne part dans les présents des Muses tresseuses de violettes… Car jamais Kitharède n’obtint plus merveilleux dons de la main même des Piérides. Elle tira du baromos lesbien des harmonies que nul, sauf Psappha elle-même, ne put égaler, et que nul ne surpassa. Ses poèmes interrompus ont la profondeur et la suavité de rayons lunaires glissant sur l’eau calme.

Éranna jette vers son Amie lointaine les beaux regrets et les vœux tenaces. Elle invoque le poisson qui envoie aux matelots une heureuse navigation et le supplie d’escorter sa douce compagne. Elle chante sa joie fervente de recevoir le portrait d’Agatharchis tracé de ses propres mains, ces mains enfantines qu’elle aime. Elle compose une épigramme divine sur Myrô, la vierge puérile dont les hochets jumeaux furent une cigale et une sauterelle.