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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/29

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taire, de criminel et de condamné. L’étranger est un frère qui demeure loin ; le prolétaire, un frère malheureux qu’il faut secourir ; le criminel, un frère tombé qu’il faut relever.

Il s’ensuit que dans l’État chrétien trois choses sont absolument inadmissibles : premièrement les guerres inspirées par l’égoïsme national, les conquêtes qui élèvent une nation sur les ruines d’une autre, — car pour l’État chrétien, l’intérêt dominant, c’est la solidarité universelle ou la paix chrétienne ; puis l’esclavage civil et économique qui fait d’une classe l’instrument passif d’une autre ; et enfin les peines vindicatives (surtout la peine de mort) que la société applique à l’individu coupable pour faire de lui le rempart de la sécurité publique. En commettant un crime l’individu prouve qu’il regarde la société comme un simple milieu et le prochain comme l’instrument de son égoïsme. À cette injustice on ne doit pas répondre par une autre, en ravalant la dignité humaine dans le criminel lui-même, en abaissant celui-ci au niveau d’une instrumentalité passive par une peine qui exclut son amélioration et sa régénération.

Dans le domaine des rapports temporels, dans l’ordre purement humain, l’État devait réaliser la solidarité absolue de chacun et de tout le monde, que l’Église repré-