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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/304

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Dans les deux premières qualités essentielles de la Divinité, Dieu pourrait se borner à sa manifestation immanente[1], au jeu éternel de Sa Sagesse ; comme tout-puissant, comme juste et vrai. Il pourrait bien se contenter de triompher en soi sur l’existence anarchique dans la certitude intérieure de Sa supériorité absolue. Mais cela ne suffit pas à la grâce et à la bonté. Dans cette troisième qualité la Sagesse divine ne peut pas se complaire en un objet purement idéal, elle ne peut pas s’arrêter à une réalisation seulement possible, à un simple jeu. Si dans sa puissance et sa vérité Dieu est tout, Il veut dans son amour que tout soit Dieu. Il veut qu’il y ait en dehors de Lui-même une autre nature qui devienne progressivement ce qu’Il est de toute éternité — le tout absolu. Pour arriver elle-même à la totalité divine, pour entrer avec Dieu dans un rapport libre et réciproque, cette nature doit être séparée de Dieu et en même temps unie à Lui. Séparée par sa base réelle qui est la Terre, et unie par son sommet idéal qui est l’Homme. C’est surtout dans la vision de la terre et de l’homme que la Sagesse éternelle déployait son jeu devant le Dieu de l’avenir : mesakheqeth bethebél artso, veshahashouhaï eth bené Adam.

Nous savons que la possibilité de l’existence chaotique, éternellement contenue en Dieu, est

  1. Immanente par rapport à Dieu et transcendante par rapport à nous