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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/311

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imaginé par l’âme dans son état de division chaotique ne peut pas cesser d’être tout, perdre complètement son unité ; et puisque ses parties ne veulent pas se compléter et se pénétrer dans une totalité positive et vivante, elles sont forcées, tout en s’excluant mutuellement, de rester cependant ensemble, de coexister dans l’unité formelle de l’espace indéfini — image tout à fait extérieure et vide de la totalité objective et substantielle de Dieu. Mais l’immensité extérieure ne suffit pas à l’âme ; elle veut aussi éprouver la totalité intérieure de l’existence subjective. Cette totalité, qui triomphe éternellement dans la trinité divine, est supprimée pour l’âme chaotique par la succession indéterminée de moments exclusifs et indifférents, qu’on appelle le temps. Ce faux infini, qui enchaîne l’âme, la détermine à désirer le vrai ; et à ce désir le Verbe divin répond par la suggestion d’une nouvelle idée. Par son action sur l’âme, la trinité suprême se reflète dans le torrent de la durée indéfinie sous la forme des trois temps. En voulant réaliser pour soi l’actualité totale, l’âme est forcée de compléter chaque moment donné de son existence par le souvenir, plus ou moins effacé, d’un passé sans commencement et par l’attente, plus ou moins vague, d’un avenir sans fin.

Et, comme base profonde et immuable de ce rapport changeant, ce sont les trois états principaux de l’âme elle-même, ses trois positions à l’égard