Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/397

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

deux sciences et deux vérités complètes et indépendantes l’une de l’autre. N’essayez pas non plus, à la façon des monophysites, de supprimer la vérité humaine, la raison philosophique, les faits de la science naturelle et historique ; n’exagérez pas leur importance, mais ne rejetez pas de parti pris la certitude de leur témoignage au nom du dogme chrétien : c’est un sacrifice déraisonnable que la Raison incarnée ne vous demande pas et qu’Elle ne saurait accepter.

« Mais ce n’est pas seulement le principe absolu de la science, c’est encore le principe de l’ordre social qui vous est confié, pères de l’humanité régénérée ! Et ici encore, en vrais orthodoxes, vous avez à suivre la voie royale entre les deux hérésies opposées : le faux libéralisme nestorien et le faux piétisme monophysite. Le premier voudrait séparer définitivement l’État de l’Église, le profane du sacré, comme Nestorius séparait dans le Christ l’humanité de la divinité. Le second voudrait absorber l’âme humaine dans la contemplation du divin, en abandonnant à leurs destinées le monde terrestre, les États et les nations ; c’est l’application sociale du monophysitisme, qui faisait disparaître la nature humaine du Christ dans son être divin. Mais vous, pontifes orthodoxes, qui avez dans le vrai dogme christologique la formule infaillible de l’union libre et parfaite, vous maintiendrez toujours le lien intime qui rattache l’État humain à l’Église de Dieu