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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/63

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Et en effet, si nous considérons l’état politique et social de l’Europe vers la fin du moyen âge, nous devons avouer que la papauté, privée de son organe séculier et obligée de cumuler les deux fonctions, n’a pas pu donner une organisation vraiment chrétienne à la société qu’elle avait gouvernée. L’unité internationale, la paix chrétienne n’existait pas. Les peuples étaient livrés à des guerres fratricides, et une intervention surnaturelle a pu seule sauver l’existence nationale de la France.

La constitution sociale de l’Europe, qui avait pour base le rapport des conquérants et des conquis, gardait toujours ce caractère antichrétien d’inégalité et d’oppression. La vie publique dominée par l’orgueil du sang qui mettait une barrière infranchissable entre le noble et le vilain et par l’esprit de violence qui faisait de chaque pays un théâtre de guerres civiles et de rapines ; enfin une justice pénale dont les atrocités semblaient être inspirées par les démons de l’enfer — comment reconnaître dans tout cela les traits d’une société vraiment chrétienne ?

L’Église, faute d’un pouvoir impérial sincèrement chrétien et catholique, n’a pas réussi à établir la justice sociale et politique en Europe. Les nations et les États modernes, émancipés de la tutelle ecclésiastique depuis la Réforme, ont essayé de faire mieux que l’Église. Les résultats de