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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/83

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nisme et auquel appartient tout l’avenir de l’humanité. » Le but définitif du christianisme dans l’histoire et la raison d’être du genre humain se réduiraient ainsi à l’existence d’une seule nation. Mais pour accepter une semblable assertion, il faudrait d’abord renier formellement l’idée même de l’Église Universelle. On nous propose un retour à l’ancien judaïsme avec cette différence que le rôle exceptionnel du peuple juif dans les plans de la Providence est attesté par la parole de Dieu, tandis que l’importance exclusive de la Russie ne peut être affirmée que sur la parole de certains publicistes russes, dont l’inspiration est loin d’être infaillible.

Du reste, puisque les idées de nos patriotes exaltés, au sujet des bases de la foi religieuse, ne sont pas tout à fait claires et déterminées, il faut nous mettre sur un terrain plus général et examiner leurs prétentions au point de vue purement naturel et humain.

Il y a quarante ou cinquante ans que le patriotisme russe s’acharne à répéter, en la variant sur tous les tons, une phrase invariable : la Russie est grande, et elle a une mission sublime à remplir dans le monde. En quoi précisément consiste cette mission et que doit faire la Russie, — que devons-nous faire nous-mêmes — pour l’accomplir ? cela demeure toujours dans le vague. Ni les vieux slavophiles, ni leurs épigones actuels, ni M. Katkof