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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome1.djvu/536

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HISTOIRE POSTHUME

À la fin de l’éloge, la pyramide sépulcrale disparut, frappée par le tonnerre ; une grande clarté succéda à l’horreur des ténèbres ; une symphonie agréable remplaça les accents lugubres, et l’on vit, dans un immense tableau du F Goujet, l’apothéose de Voltaire.

On y voit Apollon accompagné de Corneille, Racine, Molière, qui viennent au-devant de Voltaire sortant de son tombeau ; il leur est présenté par la Vérité et la Bienfaisance. L’Envie s’efforce de le retenir en tirant son linceul, mais elle est terrassée par Minerve. Plus haut se voit la Renommée qui publie le triomphe de Voltaire, et sur la banderole de sa trompette on lit ces vers de l’opéra de Samson :

Sonnez, trompette, organe de la gloire,
Sonnez, annoncez sa victoire.

Le V F de Lalande. le F Greuze et Mme de Villette ayant couronné l’orateur, le peintre et le F Franklin, tous trois déposèrent leurs couronnes au pied de l’image de Voltaire.

Le F Roucher lut de très-beaux vers à la louange de Voltaire, qui feront partie de son poëme des Douze Mois.

Que dis-je ? ô de mon siècle éternelle infamie !
L’hydre du fanatisme à regret endormie,
Quand Voltaire n’est plus, s’éveille, et lâchement
À des restes sacrés refuse un monument.
Eh ! qui donc réservait cet opprobre à Voltaire ?
Ceux qui, déshonorant leur pieux ministère,
En pompe hier peut-être avaient enseveli
Un Calchas soixante ans par l’intrigue avili ;
Un Séjan sans pudeur, qui, dans les jours iniques,
Commandait froidement des rapines publiques.
Vainement leur grandeur fut leur unique dieu ;
Leurs titres et leurs noms vivants dans le saint lieu
S’élèvent sur le marbre, et jusqu’au dernier âge
S’en vont faire au ciel même un magnifique outrage.
Pouvaient-ils cependant se flatter du succès,
Les obscurs ennemis du Sophocle français ?
La cendre de Voltaire en tous lieux révérée
Eût fait de tous les lieux une terre sacrée :
Où repose un grand homme un dieu doit habiter[1].

On fit la quête ordinaire de la loge pour les pauvres écoliers de l’Université qui se distinguent dans leurs études.

Le F abbé Cordier de Saint-Firmin proposa en outre de déposer cinq cents livres chez un notaire pour faire apprendre un métier au premier enfant pauvre qui naîtrait sur la paroisse de Saint-Sulpice après les couches de la reine, et plusieurs FF offrirent d’y contribuer.

  1. Ces vers ne se trouvent pas dans l’édition en 4 vol. petit in-12 du poëme des Mois, où ils sont remplacés par des points. (Beuchot.)