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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome13.djvu/567

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RODOLPHE II.

teur palatin, Frédéric IV, quoique calviniste, était à la tête de tous les confédérés de la confession d’Augsbourg : c’était le duc de Virtemberg, le landgrave de Hesse-Cassel, le margrave d’Anspach, le margrave de Bade-Dourlach, le prince d’Anhalt, plusieurs villes impériales. Ce parti prit le nom d’union évangélique.

Les chefs de la ligue catholique opposée étaient Maximilien, duc de Bavière, les électeurs catholiques, et tous les princes de cette communion. L’électeur de Saxe même se mit dans ce parti, tout luthérien qu’il était, dans l’espérance de l’investiture des duchés de Clèves et de Juliers. Le landgrave de Hesse-Darmstadt, protestant, était aussi de la ligue catholique. Il n’y avait aucune raison qui pût faire de cette querelle une querelle de religion ; mais les deux partis se servaient de ce nom pour animer les peuples. La ligue catholique mit le pape Paul V et le roi d’Espagne Philippe III dans son parti. L’union évangélique mit Henri IV dans le sien. Mais le pape et le roi d’Espagne ne donnaient que leur nom, et Henri IV allait marcher en Allemagne à la tête d’une armée disciplinée et victorieuse, avec laquelle il avait déjà détruit une ligue catholique.

1610. Ces mots de ralliement catholique, évangélique, ce nom du pape, dans une querelle toute profane, furent la véritable et unique cause de l’assassinat du grand Henri IV, tué, comme on sait, le 14 mai, au milieu de Paris, par un fanatique imbécile et furieux[1]. On ne peut en douter ; l’interrogatoire de Ravaillac, ci-devant moine, porte qu’il assassina Henri IV parce qu’on disait partout « qu’il allait faire la guerre au pape, et que c’était la faire à Dieu ».

Les grands desseins de Henri IV périrent avec lui. Cependant il resta encore quelque ressort de cette grande machine qu’il avait mise en mouvement. La ligue protestante ne fut pas détruite. Quelques troupes françaises, sous le commandement du maréchal de La Châtre, soutinrent le parti de Brandebourg et de Neubourg.

En vain l’empereur adjuge Clèves et Juliers, par provision, à l’électeur de Saxe, à condition qu’il prouvera son droit ; le maréchal de La Châtre n’en prend pas moins Juliers, et n’en chasse pas moins les troupes de l’archiduc Léopold. Juliers reste en commun, pour quelque temps, à Brandebourg et à Neubourg.

1611. L’extrême confusion où était alors l’Allemagne montre ce que Henri IV aurait fait s’il eût vécu. Rodolphe philosophait et

  1. Voyez tome XII, page 559.