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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome17.djvu/313

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APOCRYPHES.

les faire connaître aux profanes, il en demanda pardon à Dieu, qui le remit dans son bon sens.

Josèphe, au même endroit, rapporte encore qu’un poëte nommé Théodecte ayant dit un mot des Juifs, dans ses tragédies, devint aveugle, et que Dieu ne lui rendit la vue qu’après qu’il eut fait pénitence.

Quant au peuple juif, il est certain qu’il y eut des temps où il ne put lire les divines Écritures, puisqu’il est dit dans le quatrième livre des Rois[1], et dans le deuxième des Paralipomènes[2], que sous le roi Josias on ne les connaissait pas, et qu’on en trouva par hasard un seul exemplaire dans un coffre chez le grand-prêtre Helcias ou Helkia.

Les dix tribus qui furent dispersées par Salmanazar n’ont jamais reparu ; et les livres, si elles en avaient, ont été perdus avec elles. Les deux tribus qui furent esclaves à Babylone, et qui revinrent au bout de soixante et dix ans, n’avaient plus leurs livres, ou du moins ils étaient très-rares et très-défectueux, puisque Esdras fut obligé de les rétablir. Mais quoique ces livres fussent apocryphes pendant la captivité de Babylone, c’est-à-dire cachés, inconnus au peuple, ils étaient toujours sacrés ; ils portaient le sceau de la Divinité ; ils étaient, comme tout le monde en convient, le seul monument de vérité qui fût sur la terre.

Nous appelons aujourd’hui apocryphes les livres qui ne méritent aucune créance, tant les langues sont sujettes au changement. Les catholiques et les protestants s’accordent à traiter d’apocryphes en ce sens, et à rejeter :

La Prière de Manassé, roi de Juda, qui se trouve dans le quatrième livre des Rois ;

Le troisième et le quatrième livre des Machabées ;

Le quatrième livre d’Esdras ;

quoiqu’ils soient incontestablement écrits par des Juifs ; mais on nie que les auteurs aient été inspirés de Dieu ainsi que les autres Juifs.

Les autres livres juifs, rejetés par les seuls protestants, et regardés par conséquent comme non inspirés par Dieu même, sont :

La Sagesse, quoiqu’elle soit écrite du même style que les Proverbes ;

L’Ecclésiastique, quoique ce soit encore le même style ;

  1. Chapitre xxii, v. 8. (Note de Voltaire.)
  2. Chapitre xxxiv, v. 14. (Id.)