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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome17.djvu/346

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APÔTRES.

L’opinion que saint Pierre vint à Rome sous Néron, et qu’il y occupa la chaire pontificale vingt-cinq ans, est insoutenable, puisque Néron ne régna que treize années. La chaise de bois qui est enchâssée dans l’église à Rome ne peut guère avoir appartenu à saint Pierre ; le bois ne dure pas si longtemps ; et il n’est pas vraisemblable que saint Pierre ait enseigné dans ce fauteuil comme dans une école toute formée, puisqu’il est avéré que les Juifs de Rome étaient les ennemis violents des disciples de Jésus-Christ.

La plus forte difficulté, peut-être, est que saint Paul, dans son Épître écrite de Rome aux Colossiens[1] dit positivement qu’il n’a été secondé que par Aristarque, Marc, et un autre qui portait le nom de Jésus. Cette objection a paru insoluble aux plus savants hommes.

Dans sa Lettre aux Galates, il dit[2] « qu’il obligea Jacques, Céphas, et Jean, qui étaient colonnes », à reconnaître aussi pour colonnes lui et Barnabé. S’il place Jacques avant Céphas, Céphas n’était donc pas le chef. Heureusement ces disputes n’entament pas le fond de notre sainte religion. Que saint Pierre ait été à Rome, ou non, Jésus-Christ n’en est pas moins fils de Dieu et de la vierge Marie, et n’en est pas moins ressuscité ; il n’en a pas moins recommandé l’humilité et la pauvreté, qu’on néglige, il est vrai, mais sur lesquelles on ne dispute pas.

Nicéphore Caliste, auteur du xive siècle, dit que Pierre « était menu, grand et droit, le visage long et pâle, la barbe et les cheveux épais, courts et crépus, les yeux noirs, le nez long, plutôt camus que pointu ». C’est ainsi que dom Calmet traduit ce passage. Voyez son Dictionnaire de la Bible.

Saint Barthélemy, mot corrompu de Bar-Ptolemaios[3], fils de Ptolémée. Les Actes des apôtres nous apprennent qu’il était de Galilée. Eusèbe prétend qu’il alla prêcher dans l’Inde, dans l’Arabie Heureuse, dans la Perse, et dans l’Abyssinie. On croit que c’était le même que Nathanael. On lui attribue un évangile ; mais tout ce qu’on a dit de sa vie et de sa mort est très-incertain. On a prétendu qu’Astyage, frère de Polémon, roi d’Arménie, le fit écorcher vif ; mais cette histoire est regardée comme fabuleuse par tous les bons critiques.

  1. Chapitre iv, vers. 10 et 11. (Note de Voltaire.)
  2. Chapitre ii, vers. 9. (Id.)
  3. Nom grec et hébreu, ce qui est singulier, et qui a fait croire que tout fut écrit par des Juifs hellénistes, loin de Jérusalem. (Id.)