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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome18.djvu/27

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BOIRE À LA SANTÉ.


Si la servante de Bayle meurt entre tes bras, ne lui parle point comme à Bayle, ni à Bayle comme à sa servante ;

Si les imbéciles veulent encore du gland, laisse-les en manger ; mais trouve bon qu’on leur présente du pain.

En un mot, ce proverbe est excellent en mille occasions.



BŒUF APIS (PRÊTRES DU)[1].


Hérodote raconte que Cambyse, après avoir tué de sa main le dieu bœuf, fit bien fouetter les prêtres ; il avait tort, si ces prêtres avaient été de bonnes gens qui se fussent contentés de gagner leur pain dans le culte d’Apis, sans molester les citoyens ; mais s’ils avaient été persécuteurs, s’ils avaient forcé les consciences, s’ils avaient établi une espèce d’inquisition et violé le droit naturel, Cambyse avait un autre tort, c’était celui de ne les pas faire pendre[2].



BOIRE À LA SANTÉ[3].


D’où vient cette coutume ? est-ce depuis le temps qu’on boit ? Il paraît naturel qu’on boive du vin pour sa propre santé, mais non pas pour la santé d’un autre.

Le propino des Grecs, adopté par les Romains, ne signifiait pas : Je bois afin que vous vous portiez bien ; mais : Je bois avant vous pour que vous buviez ; je vous invite à boire.

Dans la joie d’un festin, on buvait pour célébrer sa maîtresse, et non pas pour qu’elle eût une bonne santé. Voyez dans Martial (liv. I, ép. lxxii) :

Nævia sex cyathis, septem Justina bibatur.
Six coups pour Nevia, sept au moins pour Justine[4].

Les Anglais, qui se sont piqués de renouveler plusieurs cou-

  1. Dans les Questions sur l’Encyclopédie, troisième partie, 1770, l’article Bœuf Apis se composait de l’article Apis du Dictionnaire philosophique, mais avec l’intercalation (après le mot Sacrilége) de ce qu’on lit ici. (B.)
  2. Voyez Apis. (Note de Voltaire.)
  3. Questions sur l’Encyclopédie, troisième partie, 1770. (B.)
  4. Voltaire n’a pas fait attention à l’usage des anciens de boire autant de coups qu’il y avait de lettres dans le nom de la personne qu’on voulait célébrer. Il aurait dû non-seulement écrire Nævia (et non Nevia), mais encore ne pas ajouter dans sa traduction les mots au moins, qui forment un contre-sens. (B.)