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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome29.djvu/253

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SUR L’HISTOIRE GÉNÉRALE.

d’avouer qu’il engagea un Cloderic, fils d’un roi de Cologne, à tuer son propre père, et que pour récompense il le fit assassiner lui-même, et s’empara de son petit État ; qu’il trahit et assassina Ragnacaire, roi de Cambrai ; qu’il en fit autant à un roi du Mans, nommé Renomer, et à quelques autres princes ; après quoi il tint un concile d’évêques à Orléans. On ne lui reprocha, dans ce concile, aucun de ces assassinats ; ils n’avaient été commis que sur des princes idolâtres.

Nous avons détesté le crime partout où nous l’avons trouvé ; et si les infidèles et les hérétiques ont fait quelques bonnes actions, s’ils ont eu des vertus que saint Augustin appelle des péchés splendides, nous n’avons pas cru devoir les taire. L’empereur Julien fut sobre et chaste comme un anachorète, aussi brave que César, aussi clément que Marc-Aurèle, puisqu’il pardonna à douze chrétiens qui avaient comploté de l’assassiner. Il fallait ou en convenir ou être un sot ; nous prîmes le premier parti. Un ex-jésuite de province, nommé Paulian[1] vient encore de répéter que Julien, blessé à mort au milieu de sa victoire, jeta son sang contre le ciel, et s’écria : Tu as vaincu, Galiléen ! Rien n’éclairera donc jamais les ignorants ! rien ne corrigera les gens de mauvaise foi ! Ce n’était pas contre les Galiléens que ce grand homme combattait, c’était contre les Perses. Ce conte du calomniateur Théodoret est mis actuellement par tous les savants avec l’autre conte des femmes que Julien immola aux dieux pour obtenir leur protection dans cette guerre. Le bon sens rejette ces absurdités, et l’équité réprouve ces calomnies.

La raison est l’ennemie des faux prodiges. Les globes de feu qui sortirent des fondements du temple juif, lorsque Julien permit qu’on le rebâtît, sont avérés, disait-on, par Ammien Marcellin, auteur païen ; et on nous allègue cette puérilité comme un témoignage que nos ennemis furent forcés de rendre à la vérité.

Nous exposâmes tout le ridicule de ce prodige[2]. Nous montrâmes combien Ammien aimait le merveilleux, et à quel point il était crédule. On ne pouvait donner de nouveaux fondements au temple bâti par Hérode, puisque ces fondements de larges

  1. Voyez tome XIX, page 540.
  2. Voyez tome XVII, page 319; et XXVIII, 4.