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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/276

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CORRESPONDANCE.




255. — À M. DE FORMONT[1].

Si je vous faisais des compliments, mon cher ami, de la part de toutes les personnes qui vous regrettent, et si je vous répétais tout ce qu’on dit de vous, ma lettre serait le plus long de mes ouvrages ; mais à peine ai-je le temps de vous écrire un petit billet.

Je viens d’écrire à Jore de passer chez vous pour y faire des ballots portatifs de tous les exemplaires de Charles XII avec un petit paquet séparé qui contiendra une douzaine d’exemplaires de l’édition commencée, et trente exemplaires des tragédies.

À l’égard d′Ériphyle, je vous dirai, quand je vous écrirai tout de bon, que je crois enfin en avoir fait une pièce, où la terreur et la pitié seront portées à leur comble. Le premier acte, le quatrième et le cinquième, sont tout neufs. Je compte envoyer incessamment le manuscrit à vous et à notre cher Cideville ; je l’embrasse bien tendrement. Ma première épître vous dira le reste.



256. — À M. DE CIDEVILLE.
Ce jeudi, 17 avril.

Je demande pardon à mon très-cher Cideville. Si je n’étais pas le plus sérieusement du monde occupé à des bagatelles, et si les moments de paresse qu’ont tous les vaporeux comme moi ne succédaient pas tour à tour au travail, je vous écrirais tous les jours, mon cher ami : car avec qui dans le monde aimerais-je mieux à m’entretenir qu’avec vous ? Avec qui puis-je mieux goûter les plaisirs de l’amitié et les agréments de la littérature ? Je vous renverrai votre opéra, puisque vous me le redemandez ; mais ce ne sera pas sans regretter infiniment l’acte de Daphnis et Chloé, qui est certainement très-joli, et sur lequel on ne pourrait pas faire de méchante musique. Si jamais vous avez du loisir, je vous conjurerai de l’employer à corriger les deux autres actes, et à faire à votre opéra ce que je viens de faire bien ou mal à ma tragédie : j’y viens de changer plus de la valeur de deux grands actes, et c’est de cette nouvelle manière dont on l′a va jouer à la rentrée

    modeste vertu. Adieu, mon ami, je boirai à votre santé aujourd’hui avec Mmes de Tilly et Bérenger. La vieille comtesse est toujours la même, exactement comme lorsque vous l’avez laissée, et moi toujours pour vous le même ami.

    *. Opéra de Pellegrin.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François. — C’est à tort que M. A. François a daté cette lettre du 28 septembre 1731.