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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/340

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Rothelin m’a flatté qu’en adoucissant certains traits, je pourrais obtenir une permission tacite ; et je ne sais si je prendrai le parti de gâter mon ouvrage pour avoir une approbation.

Il a fallu que je changeasse l’Épître dédicatoire de Zaïre, qui aurait paru tout uniment et sans contradiction, sans le malentendu entre monsieur votre premier président et M. Rouillé. Heureusement, toute cette petite noise est entièrement apaisée. J′ai sacrifié mon Épître, et j’en fais une autres[1].

Vous n’êtes pas le seul qui corrigez vos vers, en voici trois que j’ai cru devoir changer, dans le premier acte de Zaïre. Je vous soumets cette rognure, comme tout le reste de l’ouvrage.

FATIME.

Vous allez épouser leur superbe vainqueur.

ZAÏRE.

Eh ! qui refuserait le présent de son cœur !
De toute ma faiblesse il faut que je convienne,
Peut-être que sans lui j’aurais été chrétienne,
Peut-être qu’à ta loi j’aurais sacrifié ;
Mais Orosmane m’aime, et j’ai tout oublié.
Je ne vois qu’Orosmane, etc.

Il me semble que tout ce qui sert à préparer la conversion de Zaïre est nécessaire ; et qu’ainsi ces vers doivent être préférés à ceux qui étaient en cet endroit.

Adieu ; il ne se fait plus de bons vers qu’à Rouen. Les lettres que vous m’écrivez en sont farcies. M. de Formont a envoyé une petite épître à Mme de Fontaine-Martel qui aurait fait honneur à Sarrasin et à l’abbé de Chaulieu. Adieu ; la plume me tombe des mains.


310. — Á M. JOSSE[2].
À Paris, le 6 janvier[3].

Quoique je n’aie jamais reçu un sou des souscriptions de la Henriade[4], quoique tous ceux qui ont envoyé en Angleterre aient

  1. Voyez la note, tome II, page 537.
  2. Jean-François Josse, libraire, cité dans la lettre du 5 juin 1734, à Formont.
  3. Nous imprimons cette lettre sur l’original même, auquel se trouvaient jointes un grand nombre de souscriptions remboursées par M. de Voltaire. Cette lettre prouve qu’au commencement même de sa carrière littéraire, M. de Voltaire n’avait point cette avidité que ses ennemis lui ont tant de fois et si injustement reprochée. Il est d’ailleurs très-bien prouvé que nul auteur n’a moins tiré parti de ses ouvrages pour s’enrichir ; il les a presque toujours donnés, soit aux libraires ou aux comédiens, soit aux jeunes gens de lettres qu’il voulait encourager. (K.)
  4. L’édition de Londres, 1728, in-4o ; les souscriptions étaient d’un louis chacune