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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/363

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chain à Paris. Je ne m’accoutume pas à une si longue absence. Je vais dire à Formont que vous songez à lui, et que vous l’aimez, quoique vous soyez dans le pays de l′indifférence.

Je crois que vous verrez dans peu le duc de Richelieu, qui va porter ses grâces et ses séductions à Londres. Vous me paraissez trop Anglais pour lui faire votre cour, et de trop bon goût pour être de son avis sur les beaux-arts, qu’il entend très-mal ; mais il entend à merveille celui de plaire. C’est de tous les arts celui qu’en général les Anglais cultivent le moins, et que M. de Richelieu connaît le plus. Pour vous, vous me plairez infiniment si vous revenez après m’avoir imprimé. Écrivez-moi souvent et longuement, si vous m’aimez.


337. — Á M. DE CIDEVILLE.
Ce vendredi, 29 mai.

Mille remerciements, mon cher ami, de vos attentions pour mon Hambourgeois. Il n’y a que ceux qui ont une fortune médiocre qui exercent bien l’hospitalité. Cet étranger doit être bien content de son voyage, s’il vous a vu ; et je vous avoue que je vous l’ai adressé afin qu’il pût dire du bien des Français, à Hambourg. Je prie notre ami Formont de lui donner à souper ; il s’en ira charmé.

Ah ! qu’à cet honnête Hambourgeois,
Candide et gauchement courtois,
Je porte une secrète envie !
Que je voudrais passer ma vie,
Comme il a passé quelques jours,
Ignoré dans un sûr asile,
Entre Formont et Cideville,
C’est-à-dire avec mes amours !

Que fait cependant le joufflu abbé de Linant ? J’avais adressé mon citadin de Hambourg chez la mère de notre abbé. Ce n’est pas que je regarde le b…… de la Ville de Mantes comme une bonne hôtellerie : il y a longtemps que j’ai dit peu chrétiennement ce que j’en pensais[1] ; mais je voulais qu’il fût mal logé, mal nourri, et qu’il vît l’abbé Linant, que je crois aussi candide

  1. L’épitre en prose et en vers, dont on a donné un fragment dans une note de la lettre du 2 mars 1731, contenait des vers peu chrétiens, qui furent coupés avec des ciseaux par Cideville devenu dévot. C’est à cette épître, du mois de mars 1731, que Voltaire fait allusion. (Cl.)