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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/448

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J’ai assuré qu’il n’en a point, et je l’assure encore tous les jours. C’est un principe dont il ne faut plus s’écarter. Dans les commencements de l’orage, je lui écrivis des choses assez ambiguës : s’il m’avait fait un mot de réponse, il m’aurait rassuré, au lieu qu’il m’a laissé toujours dans l’inquiétude ; et j’ai été incertain de ce qu’il ferait et de ce que je devais faire. Sa grande faute est de ne m’avoir point écrit. Que lui coûtait-il de dire : « Je n’ai jamais vu ni connu cette édition, et c’est ainsi que je parlerai toujours ? »

Heureusement il a tenu aux magistrats ce discours, dont il aurait d’abord dû m’instruire. Il n’y a donc plus à s’en dédire. Il n’a jamais eu la moindre part à aucune édition de ce livre : c’est ce que je crois, et ce que je soutiens fermement ; mais cependant le ministère prétend qu’il faut que je lui remette cette prétendue édition, que j’avais, dit-on, fait faire par Jore. À cela je n’ai autre chose à répondre, sinon que je ne peux changer de langage, que je ne connais pas cette édition plus que Jore ; que je l’ai toujours dit et le dirai toujours. Il est bien vrai qu’il y a eu, pendant plus d’un an, des exemplaires imprimés des Lettres philosophiques, entre les mains de quelques particuliers de Paris ; mais ces exemplaires étaient d’une édition faite en Angleterre, de laquelle je ne suis pas le maître.

Je ne peux pas, pour contenter le ministère, trouver une édition qui n’existe point, et je peux encore moins me déshonorer, en trouvant une édition que j’ai toujours assuré que je ne connaissais pas. Le résultat de tout ceci est qu’il est absolument nécessaire que Jore m’instruise de tout ce qui s’est passé ; que, de mon côté, je demeure convaincu qu’il n’a jamais pensé à faire une édition ; que, du sien, il demeure tranquille ; mais, surtout, que je sache ce qu’il a dit à M. Hérault, afin que je m’y conforme, en cas de besoin.

J’apprends, dans le moment, que mes affaires vont très-bien ; que la découverte de cet imprimeur, qui faisait une nouvelle édition, a beaucoup servi à ma justification ; que tous les incrédules de la ville et de la cour se sont déchaînés contre les dévots.

Sæpe, premente deo, fort deus alter opem.

(Ovid., Trist. I, eleg. ii, v. 4.)

Écrivez-moi hardiment sous le couvert de l’abbé Moussinot, cloître Saint-Merry, à Paris. Mille compliments à nos amis.