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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/558

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par la sagesse de votre esprit, arrangé par la plume de l′auteur du Pour et Contre, ne pourrait faire qu’un très-bon effet ; après quoi, tout ce que je souhaiterais, ce serait d’être oublié de tout le monde, hors des personnes avec qui je vis, et de vous, que j’aimerai toute ma vie.


515. — Á M. L’ABBÉ D’OLIVET.
À Cirey, par Vassy en Champagne, ce 4 octobre.

Quel procédé est-ce là ? Pourquoi donc ne m’écrivez-vous point ? Avez-vous, s’il vous plaît, un plus ancien ami que moi ? Avez-vous un approbateur plus zélé de vos ouvrages ? Je vous avertis que ma colère contre vous est aussi grande que mon estime et que mon amitié, et qu’ainsi je dois être terriblement fâché. En un mot, je souhaite passionnément que vous m’écriviez, que vous me parliez de vous, de belles-lettres, d’ouvrages nouveaux. Je veux réparer le temps perdu ; je veux m’entretenir avec vous. Premièrement, je vous demande en grâce de me mander où je pourrais trouver le livre[1] pour lequel le pauvre Vanini fut brûlé. Ce n’est point son Amphitheatrum[2] ; je viens de lire cet ennuyeux Amphitheatrum : c’est l’ouvrage d’un pauvre théologien orthodoxe. Il n’y a pas d’apparence que ce barbouilleur thomiste soit devenu tout d’un coup athée. Je soupçonne qu’il n’y a nul athéisme dans son fait, et qu’il pourrait bien avoir été cuit, comme Gaufridi[3] et tant d’autres, par l’ignorance des juges de ce temps-là. C’est un petit point de l’histoire que je veux éclaircir, et qui en vaut la peine, à mon sens.

Il y a dans Paris un homme beaucoup plus brûlable : c’est l’abbé Desfontaines. Ce malheureux, qui veut violer tous les petits garçons et outrager tous les gens raisonnables, vient de payer d’un procédé bien noir les obligations qu’il m’a. Vous me demanderez peut-être quelles obligations il peut m’avoir. Rien que celle d’avoir été tiré de Bicêtre, et d’avoir échappé à la Grève. On voulait, à toute force, en faire un exemple. J’avais alors bien des amis que je n’ai jamais employés pour moi ; enfin je lui sauvai l’honneur et la vie, et je n’ai jamais affaibli par le plus

  1. De admirandis naturæ reginæ deæque mortalium Arcanis Libri quatuor.1616, in-8o.
  2. Amphitheatrum æternæ providentiæ divino-magicum, etc., 1615, in-8o.
  3. Voyez tome XX, page 455, et tome XXX, le chapitre ix du Prix de la justice et de l’humanité.