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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/238

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sieurs lettres dans lesquelles il daigne m’offrir un établissement sûr et avantageux. Je lui ai répondu que le plus bel établissement pour moi était le bonheur de le voir et de l’entendre, que je n’en voulais point d’autre, et que, si je pouvais renoncer à ma patrie et à mes amis, à qui je dois tout, je passerais le reste de ma vie dans sa cour. Voilà où j’en suis, et voilà quels seront toujours mes sentiments. Je suis même assez heureux pour que le roi de Prusse les approuve. Tout roi qu’il est, il ne trouve pas mauvais que les grands devoirs de l’amitié aillent les premiers.

Ne vous méprenez plus sur le nom d’un homme qui sera immortel dans ce pays-ci. Ce n’est point Van Hyden, c’est Van Haren[1] qu’il s’appelle. Il lui est arrivé la même chose qu’à Homère ; on gagnait sa vie à réciter ses vers aux portes des temples et des villes ; la multitude court après lui quand il va à Amsterdam. On l’a gravé avec celle belle inscription

Quæ canit ipse fecit.

Vous ne sauriez croire combien cette fadaise[2], par laquelle j’ai répondu à ses politesses et à ses amitiés, m’a concilié ici les esprits. On en a imprimé plus de vingt traductions. Il n’est rien tel que l’à-propos.

Bonsoir ; croyez qu’en tout temps et en tout lieu je songerai à vos intérêts. Je vous embrasse.


1602. ‑ À M. AMELOT,
ministre des affaires étrangères.
À la Haye, ce 17 août.

Monseigneur, heureusement le courrier n’est pas encore parti. Je profite de cet instant pour avoir l’honneur de vous informer qu’il vient d’arriver un courrier du roi de Prusse à son ministre, avec une lettre portant en substance qu’il regarde comme une violation du droit des souverains, et comme une marque de mépris pour sa personne, le passage des troupes hollandaises par son territoire sans lui avoir demandé, à lui expressément, la permission. Il ordonne à son ministre, le jeune comte de Podewils, de prendre cette affaire avec hauteur, et d’exiger une satisfaction

  1. Voyez une note de la lettre 1533.
  2. Les stances dont il est parlé dans la même note.