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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/302

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Je vous demande en grâce de vous souvenir de moi avec Mme du Deffant. Conservez-moi vos bontés et les siennes. Elle écrit à Mme du Châtelet des lettres bien plaisantes. Tentat eam, quelquefois in ænigmatibus. On les devine sur-le-champ. Adieu, monsieur ; je vous aime, je vous respecte, je vous suis dévoué pour la vie. V.

À propos, mais Mme du Châtelet vous a aussi envoyé son livre, et vous ne lui en dites mot ; elle est fort piquée de ce que vous ne lui dites pas votre avis sur le carré de la vitesse. C’est cela qui est intéressant !


1657. — À M. JACOB VERNET[1].
À Cirey en Champagne, le 1er juin.

Monsieur, un des grands avantages de la littérature est de procurer des correspondances telles que la vôtre. J’ai reçu la lettre dont vous m’avez honoré, et nous avons parlé de vous avec le Père Jacquier[2], que vous avez vu à Genève ; et je lui ai bien envié cette satisfaction.

Je ne décide point entre Genève et Rome,

(Henriade, ch. II, v. 5.)

comme vous savez ; mais j’aimerais à voir l’une et l’autre[3], et, surtout, votre académie, dans laquelle il y a tant d’hommes illustres, et dont vous faites l’ornement. L’amitié, qui m’a fait refuser tous les établissements considérables dont le roi de Prusse voulait m’honorer à sa cour, me retient en France. C’est elle qui m’empêche de satisfaire le goût que j’ai toujours eu de voir votre république ; c’est elle qui fait que Cirey est mon royaume et mon académie.

Je suis flatté que mes petites réflexions sur l’histoire ne vous aient pas déplu : j’ai tâché de mettre ces idées en pratique dans un Essai, que j’ai assez avancé, sur l’Histoire universelle depuis Charlemagne. Il me semble qu’on n’a guère encore considéré l’histoire que comme des compilations chronologiques on ne l’a écrite ni en citoyen ni en philosophe. Que m’importe d’être

  1. Voyez tome XXXIII, page 378.
  2. François Jacquier, minime et savant mathématicien, né à Vitry-le-François le 7 juin 1711, mort à Rome le 3 juillet 1788.
  3. Voltaire vit Genève le 12 décembre 1751 ; il ne vit jamais Rome.