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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/507

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1881. — À DOM CALMET[1],
abbé de senones.
De Lunéville, 13 février.

Je préfère, monsieur, la retraite à la cour, et les grands hommes aux rois. J’aurais la plus grande envie d’aller passer quelques semaines avec vous et vos livres. Il ne me faudrait qu’une cellule chaude, et, pourvu que j’eusse du potage gras, un peu de mouton et des œufs, j’aimerais mieux cette heureuse et saine frugalité qu’une chère royale. Enfin, monsieur, je ne veux pas avoir à me reprocher d’avoir été si près de vous et n’avoir point eu l’honneur de vous voir. Je veux m’instruire avec celui dont les livres m’ont formé, et aller puiser à la source. Je vous en demande la permission ; je serai un de vos moines ce sera Paul qui ira visiter Antoine. Mandez-moi si vous voudrez bien me recevoir en solitaire ; en ce cas, je profiterai de la première occasion que je trouverai ici pour aller dans le séjour de la science et de la sagesse. J’ai l’honneur, etc.


1882. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL,
à paris.
À Lunéville, le 14 février.

Mes divins anges, me voici donc à Lunéville ! et, pourquoi ? C’est un homme charmant que le roi Stanislas mais, quand on lui joindrait encore le roi Auguste[2], tout gros qu’ils sont, dans une balance, et mes anges dans l’autre, mes anges l’emporteraient.

J’ai toujours été malade, cependant ordonnez ; et, s’il y a encore des vers à refaire, je tâcherai de me bien porter. M. de Pont-de-Veyle et M. de Choiseul[3] sont-ils enfin contents de ma Reine de Babylone ? Comment va leur santé ? Sont-ils bien gourmands ? Oui et ensuite on prend de l’eau de tilleul. C’est ainsi, à peu près, que j’en use depuis quarante ans, disant toujours : J’aurai demain du régime. Mais Mme du Châtelet, qui n’en eut

  1. Augustin Calmet, né près de Commercy, en février 1672, mort le 25 octobre 1757.
  2. Père de la seconde dauphine, Marie-Josèphe.
  3. Le comte de Choiseul, auquel est adressée une lettre du 5 septembre 1752. Il fnt créé duc de Praslin le 2 novembre 1762.