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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/164

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J’ai voulu avoir le Recueil[1] H, parce que j’avais les précédents : voilà comme on s’enferre souvent.

Il n’y a pas moyen de vous faire tenir encore l’Épître à Mlle Clairon. Il faut attendre qu’elle se porte bien, qu’elle rejoue Tancrède, et que certaines gens approuvent les petites hardiesses de cette Épître. Je suis convaincu que l’acharnement de Fréron contre un homme du mérite de M. Diderot fera grand bien au Père de famille.

Vous demandez des détails sur mon triomphe de gente jesuitica : ce triomphe n’est qu’une ovation ; nul péril, nul sang répandu. Les jésuites s’étaient emparés du bien de MM. de Crassy[2], parce qu’ils croyaient ces gentilshommes trop pauvres pour rentrer dans leurs domaines. Je leur ai prêté de l’argent sans intérêt pour y rentrer ; les jésuites se sont soumis : l’affaire est faite. S’il y a quelque discussion, on fera un petit factum bien propre que vous lirez avec édification. Volà, mon ancien ami, tout ce que je peux vous mander pour le présent. Intérim, vale.


4421. — À M. LE PRÉSIDENT DE RUFFEY[3].
Au château de Ferney, pays de Gex, 16 janvier 1761.

Ambroise Decroze vous a écrit, monsieur, ou du moins vous a envoyé son petit mémoire antisacerdotal pour vous amuser ; mais il faut que j’aie aussi l’honneur de vous écrire. Je suis enchanté de votre souvenir ; j’ai le plaisir d’être rapproché de vous de plus d’une bonne lieue : c’est toujours cela ; mais le mont Jura est terrible. Je vous demande en grâce d’embrasser, pour moi, bien tendrement M. de La Marche, mon contemporain, que j’aimerai jusqu’au dernier moment de ma vie. Je voudrais qu’il pût abandonner pendant quelques jours ses campagnes de Lucullus pour venir dans mes chaumières. Je serais bien curieux de voir son Histoire des impôts[4]. Le livre de M. Mirabeau[5] me paraît d’un fou qui a de beaux accès de raison. Je suis bien persuadé que

  1. C’est-à-dire le tome huitième du recueil A, B, C, D ; Fontenoy (Paris), 1745-1762, vingt-quatre volumes in-12, dont les éditeurs furent Perau, Mercier de Saint-Léger, etc. (B.)
  2. Voyez la lettre 4398.
  3. Éditeur, Th. Foisset.
  4. Manuscrit conservé au château de La Marche, et que l’éditeur de ces lettres a parcouru. (Note du premier éditeur.)
  5. Théorie de l’impôt, Paris, 1760, in-4° et in-12, par le marquis de Mirabeau, auteur de l’Ami des hommes. C’était, suivant lui, son chef-d’œuvre.