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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/221

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Je m’aperçois que cette lettre est plus brûlable que l’Écclésiaste ; ainsi je vous supplie de vous souvenir de moi au coin de votre cheminée.

À propos, qui vous a dit que je faisais une tragédie ? Je suis fâché de vous ôter cette douce illusion. Cette lanterne vient de ce que Mme Denis, qui est toujours folle du Droit du Seigneur, avait mandé à sa sœur que nous jouerions quelque chose de nouveau et de merveilleux, mais sans lui dire de quoi il était question. Gardez-moi, je vous prie, un éternel secret, mes divins anges, sur ce Droit du Seigneur, qui m’enchante.

Pour Fanime, je la regarderai toute ma vie comme un ouvrage médiocre ; et ce beau-fils qui rend Fanime à son père, pour s’en débarrasser, me paraîtra toujours un des plus plats personnages qui aient jamais existé. Il y a des morceaux touchants, d’accord : on y pleure, je le passe ; mais je ne juge point d’un visage par un nez et par un menton : je veux du tout ensemble. Vive Tancrède ! cette pièce me paraît bien faite, neuve, singulière. Cependant nous verrons ce que je pourrai faire pour obéir à vos ordres, au saint temps de Pâques. Et la dissertation[1] contre ces barbares Anglais, vous n’en parlez pas ? Mes divins anges, je vous regarde comme la consolation et l’honneur de ma vie.

Je suis bien faible ; mais je vous aime fortement.


18 février.

Tenez, mes gloutons, vous demandiez une tragédie, voila un chant[2] de la Pucelle : c’est envoyer une grive à des gens qui veulent manger un dindon ; mais on donne ce qu’on a.

Tenez, voilà encore des Lettres[3] sur le roman de Jean-Jacques : mandez-moi qui les a faites, ô mes anges, qui avez le nez fin ! Et le Père de famille, qu’est-il devenu ?


4467. — À M. DAMILAVILLE.
18 février.

Je salue tendrement les frères, j’élève mon cœur à eux, et je prie Dieu pour le succès du Père de famille.

J’envoie aux frères une petite cargaison contenant un chant de la Pucelle, et les Lettres sur la Nouvelle Héloïse ou Aloïsia de

  1. L’Appel à toutes les nations, voyez tome XXIV, page 191.
  2. Le XIXe, celui de Dorothée.
  3. Voyez ces Lettres sur la nouvelle Héloïse, tome XXIV, page 165.