Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/327

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J’ai déjà eu l’honneur de remarquer avec vous[1] qu’il n’y eut jamais de roi de Perse appelé Darius, ni de roi des Indes appelé Porus ; que l’Euphrate, le Tigre, l’Inde, et le Gange, ne furent jamais nommés ainsi par les nationaux, et que les Grecs ont tout grécisé.


· · · · · · · · · · Graiis dedit ore rotundo
Musa loqui · · · · · · · · · ·

(Hor., de Art. poet.,.323-24.)

Pierre le Grand ne s’appelle point Pierre chez vous ; permettez cependant que l’on continue à l’appeler Pierre ; à nommer Moscow, Moscou ; et la Moskowa, la Moska, etc.

J’ai dit que les caravanes pourraient, en prenant un détour par la Tartarie indépendante, rencontrer à peine une montagne de Pétersbourg à Pékin, et cela est très-vrai : en passant par les terres des Éluths, par les déserts des Kalmouks-Kotkos, et par le pays des Tartares de Kokonor, il y a des montagnes à droite et à gauche ; mais on pourrait certainement aller à la Chine sans en franchir presque aucune ; de même qu’on pourrait aller par terre, et très-aisément, de Pétersbourg au fond de la France, presque toujours par des plaines. C’est une observation physique assez importante, et qui sert de réponse au système, aussi faux que célèbre, que le courant des mers a produit les montagnes qui couvrent la terre. Ayez la bonté de remarquer, monsieur, que je ne dis pas qu’on ne trouve point de montagnes de Pétersbourg à la Chine ; mais je dis qu’on pourrait les éviter en prenant des détours.

Je ne conçois pas comment on peut me dire qu’on ne connaît point la Russie noire. Qu’on ouvre seulement le dictionnaire de La Martinière au mot Russie, et presque tous les géographes, on trouvera ces mots : Russie noire, entre la Volhinie et la Podolie, etc.

Je suis encore très-étonné qu’on me dise que la ville que vous appelez Kiow ou Kioff ne s’appelait point autrefois Kiovie. La Martinière est de mon avis : et si on a détruit les inscriptions grecques, cela n’empêche pas qu’elles n’aient existé.

J’ignore si celui qui transcrivit les mémoires à moi envoyés par vous, monsieur, est un Allemand : il écrit Jwan Wassiliewitsch, et moi j’écris Ivan Basilovitz ; cela donne lieu à quelques méprises dans les remarques.

Il y en a une bien étrange à propos du quartier de Moscou

  1. Si c’est dans une lettre, elle parait perdut. (B.)