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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/528

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sont en guerre ; il les traite tous de brigands et de perturbateurs du repos public. Il y a dans cet ouvrage des morceaux terribles. Cela ne nous regarde pas, nous autres pauvres Français, car nous n’avons pas fait grand mal. Que Votre Altesse sérénissime daigne agréer le profond respect du Suisse V.


4742. — DE M. LE PRÉSIDENT DE BROSSES[1],
à m. fargès[2], maitre des requêtes[3].
Montfalcon, le 10 novembre 1761.

En colère contre moi, vous a-t-on dit : plaisante expression ! Que serait donc la mienne contre lui, si je daignais en avoir contre un impudent et un fol ? Ma réponse était ce qu’il méritait.

Pourquoi voulez-vous que j’aie un procès avec cet homme-là ? Je n’en ai point. Tenez pour certain, sur mon honneur : 1° qu’il ne s’agit d’autre fait que de quatorze voies de bois que mon homme lui a livrées et qu’il ne veut pas lui payer ; 2° que, dans notre traité, il n’y a aucune contenue de fond spécifiée ni garantie. Je vous ferai voir l’acte. Il connaissait tout cela d’avance ; il l’avait tant et tant visité, étant sur place. Mais il ne fait que mentir.

L’acte est un simple bail à ferme à vie, mais pour en jouir comme en jouissait le précédent fermier. Notre convention a toujours été qu’il n’y aurait point de vente de ma part (parce qu’en vendant, même à vie, je courais risque, par la clause du dénombrement, de perdre les privilèges d’immunité) ; mais que, de sa part, il se qualifierait comme il voudrait. Quant aux bois, vous avez dans ma lettre tout ce qui les concerne, rapporté mot à mot, sauf que l’acte porte de plus qu’il sera tenu d’en jouir en bon père de famille, de laisser soixante pieds des arbres extant par poses (c’est la mesure du pays), l’une portant l’autre, et de le tenir en défense du bétail pour que les coupes puissent croître en revenue. Mais encore un coup, ce n’est pas là notre difficulté.

Vous êtes décidé à lui jeter ces quatorze voies de bûches à la tête, parce qu’il ne me convient pas d’avoir un procès pour un objet si mince. C’est donc à dire qu’il faut les lui donner parce qu’il est un impertinent. Ce serait pourtant la raison du contraire. Quoi ! si votre marchand ou votre homme d’affaires lui avait livré pour 30 pistoles de vos vins, il faudrait donc les lui donner parce qu’il ne voudrait pas les payer ! À ce prix, je vous jure qu’il n’y aurait rien dont il ne se fournît : il n’est pas délicat ! je lui aurais donné sans hésiter, s’il me les eût demandées comme présent, mais on n’imagine pas une chose si basse. S’il a eu assez peu de cœur pour l’enten-

  1. Editeur, Th. Foisset.
  2. Voyez sur lui la note 2 de la page 536.
  3. Il était alors à Ferney.