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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/109

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Lekain a dû le sentir à la représentation. Les choses sont tellement amenées qu’il n’est ni décent ni possible que les deux rivaux agissent.

Cassandre, au quatrième acte, vient enlever sa femme ; mais il trouve la belle-mère expirante. Antigone dispose tout pour tuer Cassandre aux portes du temple ; mais il n’en sort pas. Au cinquième, il n’y a pas moyen de troubler la cérémonie du bûcher : les deux princes ne peuvent se douter qu’Olympie va se jeter dedans, puisqu’ils voient les offrandes qu’on apporte à Olympie sur un autel, et qu’elle doit présenter à sa mère avec ses voiles et ses cheveux. Croyez que le tout fait le spectacle le plus singulier, et le plus grand tableau qu’on ait jamais vu au théâtre ; mais encore une fois il faut des nuances, et je ne peux travailler dans l’état où je suis ; à peine puis-je suffire à Pierre Corneille.

Nous avons ici le père de la petite, qui vient d’arriver de Cassel pour voir sa fille. Celui-ci ne sera jamais commenté, ou je suis le plus trompé du monde.

Eh bien ! on vient encore de vous prendre Sainte-Lucie et le dernier de vos vaisseaux qui revenait de l’île Bourbon.

Pauvres Français ! vous n’aviez autre chose à faire qu’à vous réjouir : de quoi vous êtes-vous avisés de faire la guerre ?

Mes anges, vivez heureux. Je baise le bout de vos ailes plus que jamais.

J’ai une fluxion de poitrine, et je cesse tout travail.


4890. — DE M. D’ALEMBERT.
À Paris, 4 mai.

Oui, mon cher et illustre maître, j’ai lu ou plutôt parcouru en bâillant l’impertinente diatribe de ce petit socinien honteux[1], qui mériterait bien d’être catholique, et qui m’a fait l’honneur de m’associer avec vous pour être l’objet de sa plate satire. Il me serait bien aisé de le couvrir de ridicules, mais c’est un honneur que je ne juge pas à propos de lui faire. Peut-être cependant trouverai-je occasion de lui donner quelque jour une légère marque de reconnaissance : ces variations plaisantes sur la révélation, dont il a d’abord fait valoir la nécessité, qu’il a bornée à de l’utilité dans une édition suivante, et qu’apparemment il assurera dans la troisième être une chose tout à fait commode, et, comme on dit, bien gracieuse ; ces sottises et d’autres donneraient beau jeu à la plaisanterie ; mais l’auteur et le sujet sont trop plats pour qu’on soit tenté d’en plaisanter.

Je pourrais bien en effet mériter un peu les reproches que vous me faites

  1. Vernet, auteur des Lettres critiques d’un voyageur anglais.