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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/117

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mort, et je suis encore assez mal. J’ose me flatter que l’édition n’en souffrira pas beaucoup, les meilleures pièces étant commentées, et les autres ne méritant pas de l’être. Ce qui m’afflige, c’est l’obstacle que mettent les libraires de Paris à cette édition, que j’ai été obligé de diriger moi-même, et qui ne pouvait commencer que sous mes yeux. On a arrêté tous les prospectus chargés des noms des souscripteurs, à la chambre syndicale, sous prétexte qu’il y a des libraires de Paris qui ont le privilège des Œuvres de Corneille ; mais ce privilège doit être expiré, et appartient naturellement à la famille. D’ailleurs Mlle Corneille ne pourrait-elle pas demander le privilège d’un livre intitulé Commentaires sur plusieurs tragédies de Pierre Corneille, et sur quelques autres pièces françaises et espagnoles ? On ne pourrait, ce me semble, refuser cette justice, et le livre serait imprimé sous le nom de la veuve Brunet, qui pourrait s’accommoder avec Mlle Corneille, d’une manière avantageuse pour l’une et pour l’autre.

Ayez la bonté de me mander, monsieur, si vous approuvez cette idée, et si vous pouvez contribuer à la faire réussir. Il y a déjà deux volumes d’imprimés ; si la nature veut que je vive encore quelque temps, l’édition sera achevée dans dix-huit mois.


4896. — À M. CATHALA[1].

J’envoie à M. Cathala la requête au roi que je viens de composer. Elle suffit ; s’il est vrai que la veuve Calas, son fils, et Lavaysse, et le malheureux père, ne se sont point quittés depuis ce souper funeste, ce fait seul dit tout. Il ne faut entrer dans aucun détail. Il ne faut que toucher le roi. Ce mémoire peut faire verser des larmes et effrayer les lecteurs. Si. Mme Calas ose le signer, elle est innocente, elle, et son mari, et Pierre, et Lavaysse, Sinon ils sont tous coupables[2].

M. Cathala peut envoyer ce mémoire par la poste à M. Damilaville, premier commis du vingtième. Ne cachetez point le mémoire. Avertissez-le seulement de la demeure de la personne à laquelle il faut le rendre.

  1. Éditeur, A. Coquerel. — Autographe.
  2. Cette requête ne parut pas telle que Voltaire l’avait écrite. Mme Calas, retirée à la campagne, près de Montauban, cherchait à s’y faire oublier, et ne songeait nullement à demander une réhabilitation qui lui paraissait impossible et qui, sans Voltaire, l’était bien réellement. (Note du premier éditeur.)