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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/181

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S’il y a autant de fermeté que de bienveillance, tout ira bien. Mme de Pompadour parlera. Nous comptons, grâce à vos bontés, sur la vertu éclairée de M. le comte de Choiseul.

Je sens bien, après tout, que nous n’obtiendrons qu’une pitié impuissante, si nous n’avons pas la plus grande faveur ; mais du moins la mémoire de Galas sera rétablie dans l’esprit du public, et c’est la vraie réhabilitation ; le public condamnera les juges, et un arrêt du public vaut un arrêt du conseil.

Mes anges, je n’abandonnerai cette affaire qu’en mourant. J’ai vu et j’ai essuyé des injustices pendant soixante années ; je veux me donner le plaisir de confondre celle-ci. J’abandonnerai jusqu’à Cassandre, pourvu que je vienne à bout de mes pauvres roués. Je ne connais point de pièce plus intéressante. Au nom de Dieu, faites réussir la tragédie de Calas, malgré la cabale des dévots et des Gascons. Je baise plus que jamais le bout des ailes de mes anges.

N. B. Mme Calas sait où demeure Lavaysse ; vous pourrez le faire triompher de sa timidité.


4967. — À M. PALISSOT.
Aux Délices, 16 juillet.

Je vous dois beaucoup de remerciements, monsieur, de la bonté que vous avez eue de m’envoyer votre dernière pièce. Vous savez que votre style me plaît beaucoup ; il est coulant, pur, facile ; il ne court point après les saillies et les expressions bizarres, et c’est un très-grand mérite dans ce siècle. J’aurais peut-être désiré que vous n’eussiez point choisi un sujet si semblable à celui des Ménechmes[1], et qui n’en a pas le comique. Peut-être même, si vous vous étiez donné le temps de vous refroidir sur votre ouvrage, vous auriez supprimé quelques notes qui peuvent vous faire des ennemis. J’ai toujours été affligé que vous ayez attaqué mes chers philosophes, d’autant plus que vous prîtes le temps où ils étaient persécutés ; j’avoue que j’ai pris les mêmes libertés, mais c’est avec des persécuteurs, avec des ennemis de la littérature, avec des tyrans. Les gens de lettres devraient sans doute être unis : ils pensent tous au fond de la même façon. Pourquoi déchirer ses frères, tandis que les persécuteurs les fouettent ? Cela me chagrine dans ma retraite, où je ne voulais que rire. Comptez toujours, monsieur, sur les sentiments, etc.

  1. Voyez la note 4, page 168.