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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/340

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cats de Paris ne l’aient pas connu. Il y a des choses bien essentielles dont ils auraient fait usage. Votre indignation et votre pitié redoubleront s’il se peut à la lecture de ce mémoire. On est tenté de se faire débaptiser quand on lit les Saint-Barthélemy, les massacres d’Irlande, et l’histoire des Calas[1]. On aurait du moins grande raison de se décatholiciser.

Je vous renvoie la lettre de votre ami, qui me paraît faire peu de cas de l’arithmétique. Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien envoyer le mémoire Calas à M. Debrus, quand vous l’aurez lu.

Vous savez que l’affaire ne sera rapportée que le 8 février. Je ne dormirai point la nuit du 7 au 8.

Mon Dieu, que d’abominations !

Je prends la liberté de vous embrasser de tout mon cœur.


5132. — À M. BERTRAND.
Au château de Ferney, 9 janvier.

Votre Dictionnaire[2] doit faire fortune, mon cher philosophe : il est neuf, il est utile, et il me paraît très-bien fait. Je crois qu’il faudra dorénavant tout mettre en dictionnaires. La vie est trop courte pour lire de suite tant de gros livres. Malheur aux longues dissertations ! Un dictionnaire vous met sous la main, et dans le moment, la chose dont vous avez besoin. Ils sont utiles surtout aux personnes déjà instruites qui cherchent à se rappeler ce qu’elles ont su.

Je vous suis infiniment obligé de votre très-bon livre. Vous pouvez ajouter dans une seconde édition, à l’article Fer, que tous ceux qui ont voulu entreprendre des fabriques de fer fondu avec M. de Réaumur se sont ruinés. Dès qu’il était instruit d’une découverte faite dans les pays étrangers, il l’inventait sur-le-champ. Il avait même inventé jusqu’à la porcelaine. Il faut avouer d’ailleurs que c’était un fort bon observateur.

  1. « Voltaire m’écrit que quand on lit les horreurs que le fanatisme a produites, on serait tenté de se débaptiser ; je lui réponds qu’il serait bien mieux de se déshumaniser, car les livres des fondateurs (de l’Église chrétienne) ne respirent que charité, et c’est à l’homme plus qu’au chrétien qu’il faut reprocher les maux dont la religion ne fut jamais que le prétexte. » (Extrait d’une lettre inédite de Moultou.)
  2. Dictionnaire universel des fossiles propres et des fossiles accidentels ; 1763, deux volumes in-8o. Un article de Voltaire sur cet ouvrage fut inséré dans la Gazette littéraire du 18 avril 1764 ; voyez cet article, tome XXV, page 166.