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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/368

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De tout mon cœur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.


Voltaire.

Mes respects à Mme Le Brun.


5162. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Ferney, 20 janvier.

Mes divins anges, nous marions donc Mlle Corneille ! Il est très-juste de faire un petit présent au père et à la mère ; mais dès que ce père a un louis, il ne l’a plus ; il jette l’argent comme Pierre faisait des vers, très à la hâte. Vous protégez cette famille ; pourriez vous charger quelqu’un de vos gens de donner à Pierre le trotteur vingt-cinq louis à plusieurs fois, afin qu’il ne jetât pas tout en un jour ? Je vous demande bien pardon ; je sais à quel point j’abuse de votre bonté, mais on n’est pas ange pour rien.

Nota bene qu’on pourrait confier cet argent à la mère, qui le ferait durer.

Il y a plus. Vous sentez combien il doit être désagréable à un gentilhomme, à un officier, d’avoir un beau-père facteur de la petite poste dans les rues de Paris, Il serait convenable qu’il se retirât à Évreux avec sa femme, et qu’on lui donnât un entrepôt de tabac, ou quelque autre dignité semblable qui n’exigeât ni une belle écriture ni l’esprit de Cinna. Je vous soumets ma lettre[1] aux fermiers généraux : si vous la trouvez bien, je vous supplie de vouloir bien ordonner qu’elle soit envoyée. Peut-être même on trouverait quelque membre de la compagnie pour l’appuyer.

Cet emploi n’aurait lieu, si on voulait, que jusqu’à ce qu’on vît clair dans les souscriptions, et qu’on put assurer une subsistance honnête au père et à la mère. Je crois aussi qu’il est convenable que j’écrive à M. de La Tour-du-Pin, et que Marie écrive aussi un petit mot, quoiqu’elle dise à Mme Denis : « Maman, je n’ai pas de génie pour la composition. »

« Il est vrai que, pour la composition, ce n’est pas mon fort ; mais pour les sentiments du cœur, je le dispute aux héros de mon oncle : je conserverai toute ma vie la reconnaissance que je dois aux anges de M. de Voltaire, qui sont les miens. Je vous prie, monsieur et madame, d’agréer, avec votre bonté ordinaire,

  1. Elle manque.