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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/218

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CORRESPONDANCE.

grément, il faudra qu’au mois de mai je quitte la Suisse pour la Souabe[1]. Il est comique que le bien d’un Parisien soit en Souabe ; mais la chose est ainsi. La destinée est une drôle de chose. Je ne dois ni ne veux mourir avant d’avoir mis ordre à mes affaires.

La destinée des Scythes est à peu près comme la mienne : ce sont des orages suivis d’un beau jour. Ne regrettez point Paris quand vous serez à Hornoy, il n’y a plus à Paris que l’opéra-comique et le singe de Nicolet[2].

Je vois que les deux magistrats[3] resteront à Paris. Je prie le Grand Turc de me dire pourquoi le baron de Tott[4] est à Neuchâtel ; il me semble qu’il n’y a nul rapport entre Neuchâtel et Constantinople.

Quand M. d’Hornoy rencontrera par hasard mon boiteux de procureur, je le prie de vouloir bien l’engager à recommander au marquis de Lézeau de marcher droit.

Vous trouverez du blé en Picardie ; nous en manquons au pays de Gex : il faudra faire une transmigration à Babylone. On ne sait plus où se fourrer pour être bien. Je sais qu’il faut s’accommoder de tout ; mais cela n’est pas aussi aisé qu’on dirait bien.

Je finis, comme j’ai commencé, par vous embrasser du meilleur de mon cœur.

6836. — DE MADAME VEUVE DUCHESNE[5].
12 avril 1767.

vous le protecteur des veuves et le père des orphelins !

Quand toute l’Europe admire encore les bienfaits dont vous avez comblé Mlle Corneille, la généreuse défense des infortunés Calas, tant d’innocents protégés, tant de malheureux secourus, enfin tant de calomniateurs confondus par vos soins, serai-je la seule qui ne trouverai pas dans la grande âme de M. de Voltaire ces sentiments d’humanité que je réclame et qui la caractérisent si bien ? Avec ces idées de justice et de bonté qu’on doit avoir sur votre compte, monsieur, jugez de ma surprise et de ma douleur de voir à la fin de la pièce des Scythes, sous le nom d’avis au lecteur[6], la calomnie la plus

  1. Dans le Wurtemberg.
  2. Ce singe est le sujet d’une chanson de Boufflers ; voyez lettre 6795.
  3. Mignot et d’Hornoy, ses neveu et petit-neveu.
  4. À qui est adressée la lettre 6854.
  5. Dernier Volume des œuvres de Voltaire, 6854.
  6. Voyez tome VI, page 1862.