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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/375

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ANNÉE 1767

sera pas archevêque de Paris, mais il doit être de l’Académie. On parle d’une drôle de Théologie portative ; je ne l’ai point encore. J’espère que bientôt tous ces marauds de théologiens seront si ridicules qu’ils ne pourront nuire. Notre impératrice russe les mène grand train. Leur dernier jour approche en Pologne : il est tout arrivé en Prusse et dans l’Allemagne septentrionale. Les maisons d’Autriche et de Bavière sont les seules qui soutiennent encore ces cuistres-là ; cependant on commence à s’éclairer à Vienne même. Pardieu, le temps de la raison est venu. Ô nature ! grâces immortelles vous en soient rendues !

Mon cher philosophe, rendez tous ces pédants-là aussi énormément ridicules que vous le pouvez dans vos conversations avec les honnêtes gens : car cela est impossible à Paris par la voie de la typographie ; mais un bon mot vaut bien un beau livre. Foudroyez-moi ces marauds-là, je vous en prie.

Répandez sur eux le sel dont il a plu à Dieu de favoriser votre conversation. Faites qu’on les montre au doigt quand ils passeront dans la rue ; et quand vous les aurez bien écorchés, bien salés, marchez-leur sur le ventre en passant, cela est fort amusant. Il paraît un ouvrage de feu milord Bolingbroke[1] qui est curieux. Julien l’Apostat n’y fit œuvre. Bonsoir, vous dis-je ; je vous aime, je vous estime et je vous révère autant que je hais les b… dont j’ai eu l’honneur de vous parler.

7003. — À M. L’ABBÉ AUDRA[2].
Septembre.

La malheureuse aventure de Sainte-Foy ayant été depuis longtemps représentée au conseil du roi sous les plus noires couleurs a nui beaucoup à l’affaire des Sirven, comme je l’avais prévu. Les Sirven avaient été renvoyés par la commission des conseillers d’État ordinaires par-devant le roi lui-même, pour obtenir la cassation de la sentence confirmée par le parlement de Toulouse. Mais ce parlement a représenté avec tant d’opiniâtreté son droit de ressort contre les condamnés contumaces, droit en effet établi pour tous les parlements du royaume, que le conseil a craint les mouvements de toute la magistrature. Ces

  1. Examen important de milord Bolingbroke ; voyez tome XXVI, page 195.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François. — D’après une note du manuscrit, cette lettre serait adressée à l’abbé Audra, professeur royal à Toulouse. (A. F.)