Aller au contenu

Page:Voltaire - Idées républicaines, augmentées de remarques, éd. Needham, 1766.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
57
ment, quand pour les accomplir il faut donner des bornes à ſon autorité.

Ce diſcours eſt bien vague. Le Sultan des Turcs ne peut promettre qu’à ſes ſujets ou aux Puiſſances voiſines. Si ce ſont des promeſſes à ſes ſujets, il n’y a point de ſerment : ſi ce ſont des traités de paix, il faut qu’il les tienne comme les autres Princes, ou qu’il faſſe la guerre. L’Alcoran ne dit en aucun endroit qu’on peut violer ſon ſerment, & il dit en cent endroits qu’il faut le garder. Il ſe peut que pour entreprendre une guerre injuſte, comme elles le ſont preſque toutes, le Grand Turc aſſemblé un Conſeil de conſcience, comme ont fait pluſieurs Princes Chrétiens, afin de faire le mal en conſcience. Il ſe peut que quelques Docteurs Muſulmans ayent imité les Docteurs Catholiques qui ont dit qu’il ne faut garder la foi ni aux infideles, ni aux hérétiques. Mais il reſte à ſavoir ſi cette juriſprudence eſt celle des Turcs.

L’Auteur de l’eſprit des Loix donne cette prétendue déciſion des Cadis, comme une preuve du deſpotiſme du sultan. Il ſemble que ce ſeroit au contraire une preuve qu’il eſt ſoumis aux loix, puiſqu’il ſeroit obligé de conſulter les docteurs pour ſe mettre au deſſus des loix. Nous ſommes voiſins des Turcs, nous commerçons avec eux, & nous ne les connoiſſons pas. Le Comte de Marſigli qui a vécu vingt-cinq ans au milieu d’eux, dit qu’aucun auteur n’a donné une véritable connoiſſance ni de leur Empire, ni de leurs loix. Nous n’avons eu même aucune traduction tolérable de l’Alcoran avant celle que nous a donné Mr. Sale en 1734. Preſque tout ce qu’on a dit de leur Religion