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dialogues philosophiques

Honore père et mère, si tu veux vivre longtemps sur la terre : il me semble que Zoroastre parle en homme divin, et Moïse en homme terrestre.

4° Les événements racontés dans le Pentateuque étonnent ceux qui ont le malheur de ne juger que par leur raison, et dans qui cette raison aveugle n’est pas éclairée par une grâce particulière. Le premier chapitre de la Genèse est si au-dessus de nos conceptions, qu’il fut défendu chez les Juifs de le lire avant vingt-cinq ans.

On voit avec un peu de surprise que Dieu vienne se promener tous les jours à midi dans le jardin d’Éden ; que les sources de quatre fleuves, éloignées prodigieusement les unes des autres, forment une fontaine dans ce même jardin ; que le serpent parle à Ève, attendu qu’il est le plus subtil des animaux, et qu’une ânesse, qui ne passe pas pour si subtile, parle aussi plusieurs siècles après ; que Dieu ait séparé la lumière des ténèbres, comme si les ténèbres étaient quelque chose de réel ; qu’il ait fait la lumière, qui émane du soleil, avant le soleil lui-même ; qu’après avoir fait l’homme et la femme, il ait ensuite tiré la femme d’une côte de l’homme, qu’il ait mis de la chair à la place de cette côte ; qu’il ait condamné Adam à la mort, et toute sa postérité à l’enfer pour une pomme ; qu’il ait mis un signe de sauvegarde à Caïn qui avait assassiné son frère, et que ce Caïn ait craint d’être tué par les hommes qui peuplaient alors la terre, tandis que, selon le texte, le genre humain était borné à la